Fernand James, “le petit James” comme certains l’appelaient tandis que pour d’autres c’était Fernand, naquit en 1922 à Lesches. Fils unique, il demeura dans la maison familiale occupée jadis par une école religieuse de filles, en compagnie, jusqu’à son décès, de sa mère Eulalie, dite Lalie .
Quiconque étant entré un jour dans la grande pièce principale qui servait de cuisine, se rappelle son caractère “authentique” d’un autre siècle ; les murs noircis par la fumée donnaient une ambiance sombre et étrange à l’endroit. Au sol il y avait parfois des cageots remplis des légumes du jardin tandis que dans la cheminée ornée d’angelots vestiges de l’ancienne école, accrochées à une corde, “pendaient de vieilles chaussettes en laine tricotée où ils faisaient sécher leurs fromages faits avec le lait de leurs deux chèvres” (Récit écrit de la fille d’un Leschois) et à côté le panier grillagé suspendu contenait des picodons habités par des asticots.
Sa vie fut bien remplie et très éclectique, passant de berger communal à ramoneur, ouvrier à l’usine Plot à Die et surtout pour ce Leschois de souche, à agent de l’Equipement sur la commune. Il fit partie des premiers Sapeurs Pompiers du village mais ses passions étaient les sources, les ruches, la chasse et aussi la pêche.
En effet, il avait le “don” de sentir l’eau couler et son talent de “sourcier” était connu et même reconnu.
Il prenait du plaisir à entretenir ses ruches disposées notamment au-dessus du village ; son miel était excellent à déguster et tout particulièrement son miel en brèche, au moment de la récolte.
Pour subvenir aux besoins quotidiens, il cultivait avec soin un lopin de terre et un petit potager qui lui apportait les légumes et quand la chasse était ouverte, il partait le fusil sur l’épaule accompagné de son chien.
Il possédait aussi un âne qui attisait la curiosité des enfants qu’il promenait dans la charrette lors des premières fêtes du 15 août.
Ceux qui l’ont connu se rappellent encore ces moments où il parcourait le village en habit de garde-champêtre, tapant le tambour avec les baguettes pour annoncer une nouvelle, une réunion ou une manifestation quelconques, précipitant ainsi les villageois sur le seuil de la porte de leur maison ; c’était bien sûr une attraction attendue par les enfants. Ce fut le dernier “crieur public” : “oyez, oyez citoyens…”
Parfois aussi, au moment de la récolte de la lavande, il était possible de l’ apercevoir près du ruisseau du Clos ou de la source de Frédière, distillant la fleur bleue dans son alambic mobile.
Les dix dernières années de sa vie après la mort de sa mère, il les a passées à Luc-en-Diois en compagnie de Bellie sa chienne et, début novembre 1996, à 74 ans, il s’est éteint brutalement.
Ainsi s’est déroulée une vie remplie de plaisirs simples. A maints égards, il s’apparente au personnage central du sketch “Heureux” de Fernand Reynaud .